03/02/2010

Inna li-Llâh wa inna ilayhi raji’un

Mohamed Boukrourou est mort d’avoir refusé des médicaments génériques.
Parti à la pharmacie acheter des médicaments, il n’en est jamais revenu. Son chemin a croisé la police soupçonnée par la famille d’avoir brutalisé ce père de deux petites filles, après une interpellation musclée. Ses proches ne croient pas à la thèse de l’accident, ni à celle avancée dans un premier temps de l’arrêt cardiaque. Nous avons posé quatre questions, brèves, à son frère Abdelkader.

Al-Kanz : Pourriez-vous nous dire ce qui s’est passé ?
Abdelkader Boukrourou : Le 12 novembre vers 16 h 30, mon frère Mohamed s’est rendu dans sa pharmacie habituelle pour racheter son stock de vitamines et d’oméga 3. Seulement, il ne voulait pas de la marque proposée par le pharmacien. Le ton est monté et Mohamed voulait porter plainte contre lui. Là, l’employée a décidé de composer le 17 et d’appeler la police. Quinze minutes plus tard, quatre fonctionnaires de police sont arrivés et ont directement interpellé mon frère. Ils ont voulu le faire sortir de l’officine, mais celui-ci a refusé. Ils ont donc usé de la force pour le sortir. Pour contester cette violence, Mohamed s’est assis pacifiquement. Les quatre policiers ont alors décidé de le menotter et de le traîner jusqu’au fourgon. C’est alors que la violence a redoublé. Ils se sont acharnés sur mon frère qui en est ressorti une heure plus tard mort. Voyant qu’il ne bougeait plus, les policiers ont appelé les pompiers et le Samu qui n’ont pu que constater le décès.


Al-Kanz : Que reprochez-vous aux forces de l’ordre ?
Abdelkader Boukrourou : Je ne comprends pas pourquoi ils ont interpellé mon frère. Il n’avait commis aucun délit ni aucune infraction. Il avait juste un différend avec un commerçant comme cela peut arriver à n’importe qui. Les policiers n’ont pas cherché à comprendre ce qui s’est passé et s’en sont pris directement à lui. Pourquoi l’ont-ils menotté ? Il n’était ni un danger public ni un délinquant. Et pourquoi tant de haine dans cette interpellation ? Certains témoins disent d’une part avoir vu les policiers être assis sur mon frère, alors que celui-ci était allongé au sol, et d’autre part avoir vu le fourgon bouger violemment dans tous les sens et mon frère criant à la mort. La toilette mortuaire a démontré que Mohamed avait notamment des bleus au visage, la lèvre ouverte et un morceau de la joue arraché…
Nous ne pouvons accepter que la police, garante de notre sécurité, soit noyautée par des individus qui déshonorent cette institution. Nous ne pouvons accepter que nos enfants, nos frères, nos amis soient en sursis lorsqu’ils se font interpeller par certains fonctionnaires de police.

Al-Kanz : Qu’attendez-vous des autorités ?
Abdelkader Boukrourou : Nous attendons que justice soit faite. Le procureur a d’ailleurs ouvert une procédure pour homicide involontaire suite à la remise du rapport de deux juges d’instruction.
Nous voulons que les quatre fonctionnaires soient traduits devant les autorités compétentes, radiés de la police et bien sûr nous voulons qu’ils soient condamnés à de lourdes peines. Cela ne nous ramènera pas notre frère mais son honneur et sa dignité seront saufs. On attend également que le gouvernement actuel et même le Président de la république reconnaissent qu’il existe un malaise dans la société actuelle avec notre police. Nous voulons que l’Etat de droit soit respecté en France, pays se proclamant des droits de l’homme.

Al-Kanz : Est-ce que les lecteurs d’Al-Kanz peuvent vous aider ? Si oui, comment ?
Abdelkader Boukrourou : Nous demandons à tout citoyen de rester mobilisé pour que justice soit faite pour Mohamed et tant d’autres. Il faut nous aider à signaler cet acte immonde auprès des politiques pour qu’eux aussi agissent soit en interpellant le gouvernement, soit en saisissant la Commission nationale de déontologie de la sécurité (le parti des Verts l’a déjà fait). Il faut rester vigilant et surtout actif. Nous redoutons que le mouvement s’essouffle et qu’un certain mutisme fasse pencher la balance du côté des mis en cause. Cela va être long et nous avons besoin de votre soutien. Il faut parler de ce drame au plus grand nombre, vos amis, les amis de vos amis, les politiques, les associations, les médias… Des modèles de courriers sont accessibles sur notre Facebook «Justice pour Mohamed Boukrourou ». Rejoignez-nous, venez remplir les rangs de ceux qui condamnent et s’opposent à l’injustice.
De manière plus générale, il faut signaler tout acte portant atteinte à la dignité humaine auprès des associations comme Amnesty International, La Ligue des droits de l’homme, le MRAP, SOS Racisme et auprès des institutions comme la Halde. Il ne faut pas hésiter à interpeller vos députés, sénateurs, maires, etc. Il ne faut pas rester passif. Trop longtemps, les minorités visibles ont laissé leur place de citoyen à d’autres qui ont décidé pour eux. Il faut que chacun prenne conscience que nous sommes aussi des citoyens comme eux et que nous avons notre mot à dire. La France de papa, c’est fini, maintenant il faut compter sur nous : français de confession musulmane, français d’origine étrangère, blacks, beurs, venant de tout horizon.
Nous remercions toutes les personnes qui nous apportent leur soutien quotidiennement. Cela nous aide beaucoup à poursuivre notre combat. Merci pour nous, merci pour Mohamed Boukrourou. Rendez vous sur notre facebook « Justice pour Mohamed Boukrourou », pour suivre l’évolution du dossier. Vous pouvez aussi consulter et diffuser le dossier de presse : Dossier de presse – Mohamed Boukrourou