03/02/2010

Nos ancêtres les Gaulois

Les débats qui agitent actuellement la classe politique française (toutes tendances confondues) portent sur deux choses : l’identité nationale, débat proposé par le ministre de l’immigration, Eric Besson et la « panthéonisation » ou non d’Albert Camus.
On a commencé d’abord par cette histoire de « qu’est-ce qu’être français ? » comme si, deux siècles après leur révolution, révolution qui a pourtant enfanté « Les Lumières » et les droits de l’homme, les français ont perdu leur mémoire et sont complètement dans le noir ; ils ne savent plus qui ils sont ni d’où ils viennent. C’est marrant et c’est triste en même temps. C’est à un véritable problème métaphysique qu’ils sont confrontés nos amis de la rive nord de la Méditerranée. Ne pourrions pas leur venir en aide, nous à qui, il n’y a pas longtemps, ils voulaient faire gober par tous les moyens possibles et imaginables que nos ancêtres étaient des Gaulois ? C’est-à-dire les leurs ! Il est vrai que depuis cette très ancienne époque où les Gaulois régnaient en maitres absolus sur la France jusqu’à nos jours, la France a connu une Histoire tumultueuse. Une Histoire faite de guerres avec leurs voisins anglais ou allemands et de colonisation de terres lointaines. Les terres du continent africain en particulier. Et ce sous le prétexte fallacieux d’apporter la civilisation aux peuples autochtones. Beaucoup d’eau et de sang ont coulé sous le pont depuis cette date. Ironie de l’Histoire, la France, durant toute cette période et jusqu’à nos jours, était contrainte d’absorber, d’assimiler, d’intégrer, de donner refuge puisque c’est « une terre d’asile » par excellence à ses anciens colonisés dont une bonne partie d’entre eux avaient servi de chair à canon lors des deux guerres mondiales. N’est ce pas que c’est un juste retour de manivelle ? La France aujourd’hui n’a d’autre choix que d’accepter ce « melting pot ». Elle devrait, en principe, accepter cette simple évidence : est français quiconque a contribué d’une façon ou d’une autre à faire de ce pays ce qu’il est aujourd’hui. Quant à la deuxième polémique qui fait actuellement rage en France, particulièrement au sein du milieu intellectuel, c’est le sort qui devrait être réservé aux restes, s’il en reste encore, des restes, d’Albert Camus : les laisser pour l’éternité là où le Nobel est enterré ou les mettre dans ce triste Panthéon sur le fronton duquel est écrit « aux grands hommes, la patrie reconnaissante ». Cette initiative est de Nicolas Sarkozy. C’est pour cela qu’elle rencontre autant de réticences. Pourquoi ? Essayons d’expliquer. Mais brièvement car nous n’avons pas l’intention de participer à ces débats ; ils ne nous concernent pas vraiment. Comme vous le savez, Nicolas Sarkozy et le parti politique, l’UMP, qui l’a porté au pouvoir incarnent la droite. Or, Albert Camus, né en Algérie (Annaba) et ayant grandi dans un quartier populaire d’Alger (Belcourt), était un intellectuel plutôt de gauche. Alors ? N’est-il pas aisé d’imaginer que lorsque la droite chasse sur (ou dans) les plates bandes de la gauche c’est louche ? C’est ce que, en gros, on reproche à Nicolas Sarkozy. On lui reproche le fait de faire de la politique politicienne, démagogique, tout en ayant les yeux rivés sur un horizon pas très lointain : une campagne électorale ça se prépare plusieurs mois à l’avance même si on occupe déjà l’Elysée. Il y a même des plumes du monde politico médiatique parisien qui ont proposé, dans la foulée, à Sarkozy de devenir « Camusien ». Un retournement de veste, quoi ! Un pas que Nicolas Sarkozy, connu pour son « bling bling » et son affinité avec les milieux de la haute bourgeoisie française, celle qui détient les manettes de la technologie de pointe et des médias, n’est pas près de franchir. Dieu merci, en ce qui nous concerne, nous les Algériens, nous venons de découvrir la vérité sur nos origines. Ainsi, nos « faux frères » égyptiens, mauvais perdants comme ils sont, viennent-ils, à la suite de leur cinglante défaite en football et sur terrain neutre, de décréter que nous ne descendons pas d’une lignée arabe venue directement de la péninsule du même nom mais d’un peuple « barbare » qui vivait dans des grottes de l’Afrique du Nord et qu’on appelle aujourd’hui le Maghreb. Les français nous ont donc bernés pendant 132 ans en nous racontant des sornettes : que nos ancêtres étaient des Gaulois. C’est une bonne nouvelle. Que dis-je ? Cette nouvelle ne nous chagrine pas. Au contraire, elle nous réjouit. Elle nous met du baume sur le cœur car, hormis la langue et la religion, nous n’avons, effectivement, pas d’autres points communs avec les descendants des Pharaons. Les mesures par des anthropologues de nos périmètres crâniens ou de la longueur de nos fémurs, par exemple, feront certainement ressortir des différences significatives. Notables. Levi Strauss est mort ; il y a à peine quelques semaines ; à un âge très avancé. Dommage qu’on n’a pas eu l’idée de faire appel à cette sommité en ethnologie, avant sa mort, à l’instar des populations amazoniennes, pour venir étudier quelques spécimens de nos deux populations et nous éclairer ainsi davantage sur la véritable origine des uns et des autres. On n’en serait pas arrivé là. A se chamailler par presse interposée, et à se jeter … la balle. Pour une histoire de balle ! C’est très affligeant comme spectacle. Mais c’est comme ça.